We don’t serve your country
Don’t serve your king
Know your custom don’t speak your tongue
White man came took everyone
We don’t serve your country
Don’t serve your king
White man listen to the songs we sing
White man came took everything
We carry in our hearts the true country
And that cannot be stolen
We follow in the steps of our ancestry
And that cannot be broken
We don’t need protection
Don’t need your land
Keep your promise on where stand
We will listen we’ll unterstand
Mining compagnies, pastoral compagnies
Uranium compagnies
Collected compagnies
Got more right than people
Got more say than people
Forty thousand years can make a difference to the state of things
The dead heart lives here.
The dead heart – Midnight Oil
Prologue
Tropisme irrésistible.
Les pulsations poisseuses de la mer martèlent la laisse mousseuse du bas de plage. La mer parle. La mer chante. Pour qui ?
Le vent soufflant par-delà l’horizon - soleil couchant – ébouriffe ses cheveux et modèle son épiderme nu.
Il fait chaud.
En ce lieu sacré, saint des saints auquel il est charnellement attaché, c’est l’heure du Rêve. Instant d’intemporalité, qui fut et qui est. Période primordiale et état de l’être où s’unissent le présent, la mémoire vivante et le passé ancestral.
Mémoire du présent qui le rappelle à l’ordre.
L’éternité doit s’effacer. Le monde le rappelle à son souvenir. Yurlunggur, le serpent sacré est-il réveillé ?
Va-t-il vomir un monde devenu plus adulte ?
Non.
Une promesse doit être exaucée.
Un serment tenu.
Restituer dans le temps réel quelques impressions pour l’instant en gestation.
Le moment approche.
Bientôt.
Maintenant.
Accélération.
Face A : Le Temps réel
Fox est jeune.
Fox veut réaliser ses rêves. En particulier, celui de sa compagne Flamme. La belle désire arpenter le sol australien. Mais, la vie est courte. Aussi Fox court-il, sans cesse, après le coup suivant, celui qui lui permettra de s’envoler, c’est sûr, vers la terre australe promise.
Fox est malin. Il deale de la cocaïne dans les coins louches du parvis de la Défense. Il consomme aussi. La coke aiguise ses facultés. Elle accélère ses réflexes, dope son intellect, assouplit son corps, efface la peur et occulte la douleur. Il est meilleur. Il est LE meilleur.
Fox est Affûté. Toujours à la recherche du « gros coup ». Le dernier, celui qui lui permettra de s’offrir son billet. Mais, la course est sans fin. La déchéance approche. A moins, que cette dernière combine ne le mette à l’abri.
Il doit livrer des armes à des inconnus dans un parking souterrain. Trois types louches à l’allure et aux manières sauvages. Peu importe l’usage qu’ils en feront. Ce qui compte, c’est le pactole. La grosse galette (« roule roule la galette »).
C’est Joao qui l’a mis sur le coup. Un mec droit mais un peu énigmatique. Fox le croit indien. L’est-il vraiment ? Fox ne voit pas cette belle porte qui détonne dans l’appartement sordide du supposé indien. Lourde, taillée dans un beau bois veiné, poncée et polie jusqu’à être aussi lisse qu’une peau d’enfant. Que masque-t-elle ? Une chambre ou un autre sanctuaire plus primordial ? La question n’est pas posée. Peut-être plus tard par Flamme à la recherche de son homme.
En attendant, l’affaire dérape. Les événements se cabrent. Sin, un des potes de Fox, morfle. Coma profond. Fox est surveillé puis pourchassé par les féroces du parking qui se révèlent être les Tueurs de la Nouvelle Lune. Son appartement est dévasté et Flamme demeure introuvable. Sans doute est-elle morte comme l’atteste le cadavre défenestré en bas de l’immeuble.
Fox s’échappe au volant de sa Toyota. Il se souvient des deux mots inscrits comme une balafre sanglante sur le mur de son appartement : DHUNUPA ROM. « Telle est notre Loi ».
Quelle loi ? Son destin lui glisse entre les mains.
Face B : Le Temps du rêve
Sur l’autoroute, Fox roule pied au plancher. Il hallucine. Les informations se télescopent dans sa caboche. Son cerveau carbure aussi vite que sa voiture et risque la surchauffe.
La police le traque-t-elle ou non ? Flamme est-elle vraiment morte ? Les Tueurs de La Nouvelle Lune, leur chef Redrun en tête, sont-ils à ses trousses ?
Il enfourne une cassette dans l’autoradio de la Toyota. Les premières notes de « Gimme shelter » de The Sisters of Mercy résonnent dans l’habitacle.
Oh, see the storm is threatening
My very life today
If I don’t get some shelter
Yeah, I’m gonna fade away
War, children
It’s just a kiss away
It’s just a kiss away
Yeah
Oh, see the fire is sweeping
Down through the streets today
Burning like a bright red carpet
Another fool who lost the way
Rape. murder.
It’s just a kiss away
It’s just a kiss away
Yeah
Oh, see the storm is threatening
My very life today
If I don’t get some shelter
Yeah, I’m gonna fade away
Love, sisters
It’s just a shot away
It’s just a shot away
Love, sisters
It’s just a shot away
Shot away
Shot away
War, children
It’s just a kiss away
It’s just a kiss away
War, children
It’s just a kiss away
Kiss away
Kiss away
Rape. murder.
It’s just a kiss away
It’s just a kiss away
Rape. murder.
It’s just a kiss away
Kiss away
Kiss away
La nuit est tombée.
Soudain une Saab 900 Turbo noire aux vitres teintées bleue le prend en chasse. Elle déboîte, le menace. Les étincelles fusent, le véhicule tangue. Elle l’a touchée. Ce sont les tueurs de la Nouvelle Lune forcément - Redrum au visage noir couturé de cicatrices et ses deux sbires. La course-poursuite s’engage. Road movie ? Non, stock-car movie.
Fox slalome entre les autres voitures. Il accélère, freine, déboîte. Rien n’y fait. La Saab lui colle au pare-choc. Les phares éclairent l’intérieur de l’habitacle dessinant sa silhouette dans le miroir de courtoisie. Les chasseurs le mirent dans leur ligne, prêt à faire un carton. Ils sont acharnés et ne le lâcheront pas.
Le Rêve se substitue à la réalité sans que la drogue n’y puisse plus rien. La cocaïne est un allié puissant mais elle ronge le cerveau. La sueur colle à son épiderme glacé comme la peau d’un serpent. Yurlunggur, le python sacré est réveillé. Fox n’a plus de prise sur son destin. Il fonce, droit devant. Les rails de sécurité sont comme les parois rayées du canon d’une arme. Il doit combattre.
Plus le temps de s’effrayer.
Plus le temps de songer à Flamme.
No time for cry.
It's just a feeling
I get sometimes
A feeling
Sometimes
And I get frightened
Just like you
I get frightened too
but it's...
(no no no) No time for heartache
(no no no) No time to run and hide
(no no no) No time for breaking down
(no no no) No time to cry
Sometimes in the world as is you've
Got to shake the hand that feeds you
It's just like Adam says
It's not so hard to understand
It's just like always coming down on
Just like Jesus never came and
What did you expect to find
It's just like always here again it's...
(no no no) No time for heartache
(no no no) No time to run and hide
(no no no) No time for breaking down
(no no no) No time to cry
Everything will be alright
Everything will turn out fine
Some nights I still can't sleep
And the voices pass with time
And I keep
[repeat]
No time for tears
No time to run and hide
No time to be afraid of fear
I keep no time to cry
(no no no) No time for heartache
(no no no) No time to run and hide
(no no no) No time for breaking down
(no no no) No time to cry
The Sisters of Mercy
La destination de Fox est déjà fixée. Au bout de la piste asphaltée sur une plage, Yurlunggur l’attend. Honorera-t-il son rendez-vous ? Renaîtra-t-il, craché violemment, à la face du monde ? A lui de modeler son avenir.
Et les chants retentissent de plus en plus forts dans sa tête. Sourds, graves, monotones et accompagnés d’un cliquetis rythmé.
Epilogue
Le roman est posé sur le bureau dans le passé et pourtant il reste bien présent. Bon récit, court et nerveux. Il reste imprimé dans sa mémoire. Le taux d’adrénaline dans le sang qui pulse dans ses tempes, redescend peu à peu.
Son voyage immobile en une autre dimension est terminé. Moment d’écriture accouché au forceps.
Il lira un autre livre, un autre jour.
Pour l’instant, la mer dont le ressac découvre et recouvre la plage éternelle l’appelle.
* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *
Titre : Yurlunggur
Auteur : Jean-Marc Ligny
Edition : Présence du Futur n°439, Fantastique, 1987